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Analyses critiques

Initiatives locales et numérisation du 

système de surveillance des maladies épidémiques 


Étude de cas de la e-santé en milieu rural au Burkina Faso

Hamidou Sanou

Enseignant-Chercheur, Assistant, dép de Sociologie et d’Anthropologie, université Daniel Ouezzin Coulibaly

Chercheur au laboratoire GRIL, université Joseph Ki- Zerbo, Burkina Faso

hsanou@ymail.com


Gabin Korbéogo

Professeur de sociologie, laboratoire Groupe de recherche sur les initiatives locales (GRIL),
université Joseph Ki-Zerbo, Burkina Faso

kgabin1@hotmail.com


Dan Wolf Meyrowitsch

Professeur associé et épidémiologiste, section Santé mondiale, département de Santé publique, université de Copenhague, Danemark

dame@sund.ku.dk


Helle Samuelsen

Professeure associée, département d’Anthropologie, université de Copenhague, Danemark

h.samuelsen@anthro.ku.dk

numéro :

Les administrations africaines :
décolonialité, endogénéité et innovation

African Administrations:
Decoloniality, Endogeneity, and Innovation

Tawala za Kiafrika:
kuacha ukoloni, endogeneity na ubunifu

:الإدارات الأفريقية
إنهاء التركة الاستعماريّة، المحلّيّة والابتكار

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Publié le :

20 juin 2024

ISSN : 

3020-0458

06.2024

La surveillance des maladies est l’un des domaines dans lesquels la santé numérique, ou e-santé, est de plus en plus appliquée, en particulier dans les pays à faible revenu. Au Burkina Faso, la libéralisation du secteur des télécommunications depuis 1996 a offert une opportunité pour utiliser les technologies de l’information et de la communication (TIC) dans le secteur de la santé. En 2004, le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique (MSHP) a adopté une politique de e-santé visant à couvrir 95 % des établissements de santé avec des solutions TIC d’ici 2020. Cet article accorde une attention particulière aux innovations émergentes dans le système de surveillance intégrée de la maladie et de la réponse (SIMR) face à l’intégration insuffisante par l’État des TIC dans le système de santé. Plus spécifiquement, nous nous concentrerons sur les innovations dans les centres de santé et de promotion sociale (CSPS). L’étude a été menée dans le district sanitaire de Dandé, au sud-ouest du Burkina Faso. Sur la base de méthodes qualitatives, les données ont été collectées lors d’entretiens semi-structurés avec 11 infirmiers en chef (ICP), 10 gestionnaires du programme élargi de vaccination (PEV), 2 membres du centre d’information sanitaire et de surveillance épidémiologique (CISSE), 15 agents de santé communautaires (ASC), ainsi que par l’observation de l’utilisation des TIC. L’analyse qualitative du contenu a été réalisée en utilisant les concepts de « bricole » et de « bricolage » pour discuter de nos résultats. Avec l’avènement de la téléphonie sans fil, le gouvernement a tenté de construire une infrastructure numérique en équipant les CSPS de puces téléphoniques Moov Africa (ex-Telmob) et d’une flotte mobile prépayée de 5 000 FCFA par mois pour la collecte et le transfert de données épidémiologiques appelées « Télégramme-lettre officielle hebdomadaire » (TLOH). Les résultats ont montré que l’utilisation de ce dispositif « flotte TLOH » rencontre des difficultés liées au signal du réseau téléphonique Moov Africa qui n’est pas stable, notamment dans les localités rurales. D’autres difficultés résident dans le fait que le modèle standard de téléphone acquis par les CSPS ne possède pas les fonctionnalités leur permettant de s’adapter aux défis de saturation des appels vers les CISSE. La flotte mobile étant conçue uniquement pour les appels téléphoniques, il est par exemple impossible pour les agents de santé d’envoyer des SMS ou d’utiliser Internet ou l’application WhatsApp. Pour surmonter ces défis, la majorité des ICP utilisent leur téléphone personnel pour envoyer des SMS ou appeler les numéros personnels du CISSE. Ces numéros n’étant pas enregistrés dans le système de la flotte mobile, les ICP sont obligés de prendre en charge le coût des appels et des SMS. À l’ère de la convergence numérique, les stratégies d’adaptation des agents de santé à ce nouvel environnement impliquent l’utilisation de smartphones et de données mobiles. WhatsApp est ainsi devenu un palliatif aux problèmes de file d’attente et d’instabilité du réseau téléphonique. Les données étant envoyées tous les lundis matin avant 10h, les ICP préfèrent utiliser leurs propres moyens pour transférer les TLOH via WhatsApp dès le dimanche soir. Nos résultats montrent également qu’en plus des TLOH, les fiches de suivi des patients et celles d’investigation sont désormais dématérialisées via WhatsApp. Plusieurs groupes WhatsApp (TLOH DS DANDE, INFO_CISSE DS DANDE, par exemple) et le compte WhatsApp personnel du responsable CISSE permettent de transmettre des données sous forme de note photographiée, de fichiers Excel ou Word. En définitive, nos résultats montrent à quel point les efforts de l’État sont négligeables dans la mise en œuvre de la politique « e-santé ». Ils attirent ainsi l’attention des autorités sanitaires sur la nécessité de construire une infrastructure numérique publique fiable qui prend en compte les défis environnementaux des localités rurales.   


Mots-clés  

Numérique, santé, m-santé/e-santé, maladies à potentiel épidémique, Burkina Faso

Plan de l'article

Introduction


Les concepts de « bricole » et de « bricolage » dans le système de santé


Méthodologie de recherche


Présentation de la zone d’étude

Collecte des données

Analyse des données


Résultats


Fragments et temporalité de l’adoption de la e-santé au Burkina Faso

Gestion des innovations émanant du système de gestion des TLOH

TIC personnelles : utilisations dans d’autres domaines de la surveillance épidémiologique


Discussion


Conclusion

Introduction


La e-santé – ou santé numérique – fait référence aux systèmes et services numériques dans le domaine de la santé (OMS, 2009). Cela concerne les pratiques médicales et de santé publique prises en charge par des appareils mobiles tels que les téléphones portables, les tablettes et les ordinateurs portables, ainsi que la pratique de la médecine à distance via Internet avec des outils tels que les dossiers médicaux sous forme vidéo et électronique (OMS, 2011 ; Bajpai, 2012 ; Petersson, 2014). L’utilisation d’appareils mobiles pour fournir des services de santé a fait naître l’espoir d’un nouvel avenir pour les soins dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Cette promesse réside dans la capacité de ces appareils à s’affranchir du temps et de la distance pour se connecter directement avec les patients, et cela est plus rentable pour les systèmes de santé. La technologie numérique vise également à rendre les systèmes de santé nationaux davantage axés sur les données grâce à la collecte « en temps réel » de certains indicateurs de santé (Neumark & Prince, 2021). Plusieurs innovations m-santé – ou santé mobile – ont été déployées pour accroître l’efficacité et la transparence (Al Dahdah et al., 2015 ; Lau et al., 2020) dans les domaines de la santé maternelle et infantile, des maladies infectieuses, des maladies chroniques et de la santé mentale (Labrique et al., 2013).
La surveillance de la santé publique signifie « l’identification, la collecte, le regroupement, l’analyse et l’interprétation systématiques et continues des données sur l’apparition de maladies et d’événements de santé publique dans le but de prendre, en temps opportun, des mesures efficaces […] » (OMS, 2019, p. 1). La surveillance des maladies est l’un des domaines dans lesquels la santé numérique est de plus en plus appliquée, ceci suite à l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest et à la pandémie, plus récente, de Covid-19 (Schwamm et al., 2020 ; Neumark & Prince, 2021). Les approches de santé numérique comprennent la communication, les initiatives éducatives et les solutions numériques de gestion des patients. Elles s’appuient sur des applications telles que WhatsApp, Slack, Facebook, Twitter et Zoom. De telles innovations répondent à la nécessité de protéger les patients vulnérables des risques associés à l’hospitalisation, de promouvoir les distances sociales et de protéger le personnel soignant (Kichloo et al., 2020 ; Robbins et al., 2020 ; Wood et al., 2021). La mise en place d’une infrastructure de surveillance numérique vise à proposer des décisions politiques de santé fondées sur des données pour améliorer la réponse aux urgences sanitaires (Al Dahdah, 2019 ; Ortega et al., 2020 ; Sittig & Singh, 2020). Ces technologies se sont également révélées indispensables dans la réponse au Covid-19 (Lau et al., 2020 ; Schwamm et al., 2020).
Avec l’adoption de la téléphonie mobile, les interventions m-santé ont rapidement augmenté dans les pays en développement (Blanchet et al., 2015 ; Meyer et al., 2020 ; Ojo, 2022). Les recherches montrent que les pays africains sont devenus des terrains émergents pour les approches de santé mobile grâce à des projets financés par des organisations non gouvernementales (ONG) (Poggiali, 2016 ; Njoroge et al., 2017 ; Friederici et al., 2020). Ces innovations ne sont pas nécessairement inclusives ou universelles, même si elles prétendent produire des résultats de manière plus efficace et plus rentable (Neumark, 2020 ; Prince, 2020). Malgré l’optimisme suscité par les technologies numériques en matière de couverture sanitaire universelle, rien ne prouve pour l’instant qu’elles contribuent à rendre les systèmes nationaux plus robustes ou plus abordables (Friederici et al., 2020). Des expériences de gestion des données numériques ont même montré que les projets de m-santé empêchent l’adoption de stratégies plus fondamentales et éprouvées en période de crise de santé publique (Erikson, 2018, 2021). Les interventions de m-santé exacerbent la financiarisation et la privatisation des soins, révélant le pouvoir croissant des entreprises technologiques pour influencer l’agenda de santé publique (Al Dahdah, 2019 ; Storeng & de Bengy Puyvallée, 2021). Compte tenu des défis liés à la mise en place de projets de m-santé, les agents de santé supportent les coûts de la « m-santé informelle » (Chib et al., 2014) en utilisant, par exemple, leurs téléphones portables personnels pour rendre divers services numériques (Silva & Ben Ali, 2010 ; Blaschke & Lucas, 2017 ; Hampshire et al., 2017).
Au Burkina Faso, de 1994 – date d’introduction de la téléphonie fixe – à 2001, la télédensité d’une ligne téléphonique est restée faible. La majorité des télécentres (75 %) étaient concentrés dans la seule ville de Ouagadougou en 1998. L’accès aux télécommunications est resté préoccupant, malgré quelques tentatives d’implantation de télécentres dans certains villages (Ouedraogo, 2004). La libéralisation du secteur des télécommunications s’est accompagnée de l’avènement de la téléphonie mobile et des connexions Internet en 1996 avec le réseau Moov Africa. Plus tard, respectivement en 2000 et 2001, les réseaux Telecel et Orange ont été introduits (Ouedraogo, 2004). Très vite, les chiffres indicatifs de l’accès au téléphone portable ont augmenté, faisant de celui-ci l’outil de communication le plus accessible pour les populations desservies (MENPTD, 2020).
La décision du gouvernement d’introduire ces technologies mobiles et numériques dans le système de santé a été prise en 2004, suite à l’adoption de la politique de e-santé. L’objectif de cette politique, révisée en 2016, était de couvrir 95 % des établissements de santé en solutions TIC d’ici 2020 (MSHP, 2016). Avec l’arrivée du Covid-19 en 2020, une étude a montré que l’adoption de la m-santé a donné lieu à une multitude de projets dans le système de santé depuis l’adoption de cette politique. Dans la surveillance des maladies (collecte de données, stockage), par exemple, certaines de ces innovations ont été déployées pour pallier le Covid-19. La plupart de ces innovations sont conçues, financées et mises en œuvre par des donateurs étrangers (Map & Match Data Sets, 2021). Or, à notre connaissance, peu de recherches se sont concentrées sur ce terrain expérimental des projets top-down de santé numérique, malgré le fait que, aussi parfaites soient-elles techniquement, les innovations verticales subissent « une épreuve aux résultats imprévisibles, qui se transforme souvent en “revanche des contextes” » (Olivier de Sardan, 2022, p. 6). En ce sens, des recherches ethnographiques dans le cadre de projets d’ONG ou de centres de recherche ont montré que la santé mobile peine à produire les résultats escomptés et est sauvée par des agents de santé qui adoptent des stratégies adaptatives face à divers défis (problèmes de réseau et d’Internet, etc.) (Sanou et al., 2016 ; Arnaert et al., 2019 ; Sawadogo et al., 2021). Au vu de ces efforts personnels, la santé numérique se veut un phénomène dynamique et multiforme qui englobe l’utilisation informelle des technologies numériques pour les soins par un patient ou un professionnel soignant (Hampshire et al., 2021).
La surveillance des maladies potentiellement épidémiques s’effectue par le biais de formulaires de notification de cas, de formulaires d’enquête descriptive de cas, de tableaux synthétiques et de graphiques pour l’analyse chronologique des données (MSHP, 2016). La surveillance épidémiologique est mise en œuvre à tous les niveaux du système de santé : notamment au niveau de la communauté locale (agents de santé communautaires – ASC – et dirigeants communautaires), des centres de santé périphériques (agents de santé tels que l’infirmier en chef, le responsable du PEV et les accoucheuses ou les sages-femmes), du district sanitaire (bureau des CISSE et laboratoire), et de la direction régionale de la santé (CISSE régionaux et laboratoires régionaux de référence). Des descriptions standardisées des cas suspects, probables et confirmés sont élaborées et remises aux acteurs en fonction de leur niveau d’éducation, afin qu’ils puissent assurer une détection et une notification harmonisées. Toutefois, la déclaration d’épidémie repose sur un certain nombre de cas notifiés et confirmés pour chaque maladie à déclaration obligatoire.
Un seul cas de maladie découvert constitue une présomption d’épidémie, nécessitant une notification immédiate, le traitement du patient, un examen sanguin en laboratoire et une investigation dans le but d’identifier les facteurs de risque et de savoir les mesures à prendre. Cependant, selon les maladies identifiées, une épidémie est déclarée lorsqu’un certain nombre de cas confirmés est atteint en une semaine ou un mois. Seule l’autorité sanitaire, le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique (MSHP), a le pouvoir de déclarer une épidémie après analyse des données disponibles. Toute confirmation d’un cas doit déclencher une réponse par le biais de mesures telles que des campagnes de vaccination et d’éducation d’urgence, comme recommandé par le système SIMR (MSHP, 2016 ; Rasmussen & Sahay, 2021).
L’analyse du paysage numérique du système de santé du Burkina Faso a identifié 31 outils numériques, dont au moins 18 ont été déployés pour lutter contre le Covid-19. Parmi ceux-ci, le logiciel d’information sanitaire de district 2 (LISD2) ou « line-list » (en jargon institutionnel) et le système de traçabilité des échantillons de laboratoire (STELab) qui sont mis en œuvre dans le SIMR et relient les districts sanitaires aux directions régionales de santé (Map & Match, 2021). Ces applications, fruit de partenariats avec des ONG, ne sont pas encore mises en œuvre au niveau des CSPS. Concernant la connexion des CSPS aux districts sanitaires, il s’avère que les tentatives de numérisation du SIMR sont restées médiocres. Dans un tel contexte, cet article discute de l’émergence de la m-santé informelle dans le SIMR. Il accorde une attention particulière à la façon dont les agents de santé gèrent les TIC face à l’insertion inadéquate des solutions technologiques dans le système de santé du Burkina Faso. Plus spécifiquement, nous nous concentrerons sur les innovations en cours dans les CSPS où les projets verticaux m-santé sont mis en œuvre au coup par coup, comme le montreront les résultats. Ce niveau institutionnel est au centre de la présente étude pour plusieurs raisons : 1) les CSPS sont les sous-entités institutionnelles où la surveillance est activement exercée et les données sont collectées au niveau de base du système de santé ; 2) c’est également à ce niveau que s’effectuent la prise en charge des patients et la réponse à toute épidémie déclarée, générant ainsi plusieurs interactions entre les agents de santé du CSPS et ceux du district sanitaire.


Les concepts de « bricole » et de « bricolage » dans le système de santé


Les technologies sont des instruments qui facilitent la réalisation d’objectifs donnés. Leur efficacité dépend, compte tenu des difficultés rencontrées dans l’offre de soins, des possibilités innovantes qu’elles permettent dans les pratiques médicales. L’utilisation de ces outils numériques suggère d’utiliser la notion de « bricolage » et de « bricole » pour mieux caractériser les pratiques d’innovation (Benouniche et al., 2014) des agents de santé du district sanitaire de Dandé (DSD) dans un contexte national de mise en œuvre fragmentée de la m-santé. Selon Domínguez-Guzmán et al. (2022), le « bricolage » fait référence à la compensation du caractère pas tout à fait moderne des infrastructures, tandis que « bricoler » signifie se contenter de ce qui est à portée de main. Selon ces auteurs, lorsque le contrôle pour lequel la technologie moderne est conçue s’avère difficile à réaliser, les soins prodigués aux patients prennent la forme de bricolage du fait de l’absence d’information sur les infrastructures.
Ces deux notions font référence aux efforts que déploient les utilisateurs lorsque les infrastructures ne parviennent pas à répondre au prétendu idéal moderniste (Mol, 2008 ; Domínguez-Guzmán et al., 2022). En effet, le bricolage est un processus créatif et adaptatif qui se produit au quotidien dans la pratique sociale, tandis que l’adaptation désigne la façon dont les utilisateurs locaux apprennent à faire fonctionner les équipements (Mayaux et al., 2023). Compte tenu des données ethnographiques disponibles, les concepts de « bricolage » et de « bricole » sont appropriés pour explorer la réalité de la santé mobile informelle.


Méthodologie de recherche


Présentation de la zone d’étude


Le district sanitaire de Dandé est l’une des zones d’intervention de ce programme de recherche, de même que le district de santé de Tenkodogo. Le DSD est situé dans la partie nord de la province du Houet et couvre une superficie de 3 516 km². C’est l’un des huit districts de la région sanitaire des Hauts-Bassins. Le DSD partage sa frontière nord avec le Mali et la province de Banwa (Burkina Faso), et sa frontière sud avec le district sanitaire de Do. Le DSD est également bordé à l’est par les districts de santé de Dafra et Léna, et à l’ouest par le district de santé de N’Dorola (province du Kénédougou). L’arrondissement couvre six communes rurales, sur les 13 que compte la province du Houet, et 97 villages formant un continuum le long de la route nationale no 9 de Bobo jusqu’à la frontière malienne. La population du district est estimée à 315 370 habitants en 2021(DHD, 2022).
L’agriculture constitue la principale activité économique, elle repose essentiellement sur les cultures vivrières (maïs, sorgho et mil), les cultures de rente (coton et arachide), l’élevage extensif (bovins, ovins, caprins et porcins), etc. Le profil épidémiologique de la population du district de Dandé est aujourd’hui dominé par la réémergence de maladies potentiellement épidémiques telles que la rougeole et la méningite, et l’émergence de la dengue, des infections respiratoires aiguës sévères (SRAS) et des diarrhées sanglantes (Sanou, 2023). Ebola et le coronavirus sont aussi des maladies émergentes surveillées au sein du DSD (DHD, 2022).

Collecte des données


Nos recherches se sont déroulées dans 15 centres de santé et de promotion sociale du DSD. Au début de l’enquête, les critères de sélection des centres de santé étaient la survenue d’une épidémie de rougeole, de méningite, de fièvre jaune ou de poliomyélite dans les cinq années précédant la présente étude. Nous nous sommes rendus au CISSE où nous avons analysé les statistiques de 2015 à 2019. Avec l’aide du gestionnaire principal adjoint des données du CISSE, nous avons consulté des documents administratifs (formulaires de déclaration, rapports d’enquête, etc.). Hormis l’épidémie de rougeole signalée à Kimini en 2019, nous n’avons identifié la survenue d’aucune autre épidémie. En l’absence d’épidémie, nous avons enregistré tous les cas isolés de chaque maladie épidémique par le CSPS. Nous avons sélectionné les CSPS de Bama, Dandé, Faramana, Kimini, Lahirasso et Samandeni, qui ont enregistré le plus grand nombre de cas déclarés et confirmés de maladies épidémiques. D’autres CSPS ont été ajoutés à cette liste ; ils ont été sélectionnés grâce à la technique d’échantillonnage ciblé, au fur et à mesure que de nouveaux cas isolés de maladies épidémiques ont été signalés au cours de l’étude. Cette technique d’échantillonnage raisonné nous a permis d’inclure 9 CSPS supplémentaires où des cas de rougeole ou de méningite ont été déclarés.   
Les données ont été collectées du 1er décembre 2019 au 30 mai 2020. Cette collecte s’est appuyée sur des entretiens semi-directifs auprès d’agents de santé et de gestionnaires de données du CISSE. Les entretiens ont porté sur : les rôles des CSPS dans le système de surveillance, la reconfiguration du système par les TIC, les interactions dans la surveillance, les difficultés rencontrées et les adaptations initiées dans l’utilisation des TIC. L’objectif des entretiens était d’obtenir des réponses riches et variées à des questions plus ou moins ouvertes (Low, 2012). Les participants à l’étude ont été systématiquement inclus dans l’enquête et comprenaient 11 ICP, 10 gestionnaires du PEV, 2 membres du CISSE et 15 Agents de santé à base communautaire (ASBC). Au total, 38 participants ont été interrogés. Les entretiens ont été menés en français et enregistrés à l’aide d’un dictaphone.
Les entretiens ont été étayés par des observations directes de l’utilisation des TIC, notamment dans le contexte de la surveillance du Covid-19. Six mois de travail de terrain nous ont permis d’observer les interactions socioprofessionnelles possibles grâce aux TIC. En adoptant cette hétérogénéité de pratiques des sciences sociales, nous avons réussi à rassembler des données pouvant servir d’éléments d’appréciation aux initiatives locales de numérisation du système de surveillance des maladies épidémiques mis en place pour les analyses menées dans le DSD.

Analyse des données


La méthode utilisée a été celle de l’analyse des données qualitatives. Les entretiens ont été transcrits en respectant la confidentialité. La première étape a été l’organisation et l’indexation des données. Nous avons utilisé des méthodes d’analyse de contenu et thématiques, en effectuant un codage des données pertinentes. Cette analyse a permis de regrouper les codes sous des rubriques et de formuler une description générale du sujet de recherche (Elo & Kyngas, 2008). Des extraits convaincants ont été sélectionnés et analysés manuellement en les reliant aux questions de recherche. Selon l’analyse qualitative, l’objectif est d’identifier des tendances et des variations significatives, et non d’atteindre une certaine représentativité (Emerson et al., 1995).


Résultats


Fragments et temporalité de l’adoption de la e-santé au Burkina Faso


Le Télégramme-lettre officielle hebdomadaire (TLOH) fait référence aux données collectées au cours d’une semaine sur les maladies potentiellement épidémiques comme la rougeole, la méningite, la poliomyélite, la fièvre jaune, etc. Ce sont ces données qui permettent aux CSPS de suivre l’évolution des maladies afin de ne se laisser surprendre par aucune épidémie.
Ceci est le Télégramme-lettre officielle hebdomadaire […]. Du lundi au dimanche, lorsque les unités de santé collectent des données sur ces cas, elles les compilent. […] Lundi matin avant 10h, il leur est demandé de nous transmettre ces données. En fait, ce sont des données épidémiologiques, et nous les récupérons et les transmettons au niveau supérieur. L’échelon supérieur immédiat, à savoir la région, transmet ces données au plus tard le mardi qui suit à 10h. […] En analysant le TLOH, nous pouvons tracer des courbes de maladies à potentiel épidémique pour voir où se situe la menace. (Substitut, CISSE du district de santé de Dandé)
La collecte hebdomadaire des données est réalisée par les infirmiers en chef. Les données TLOH doivent être transmises au CISSE d’arrondissement au plus tard à 10h chaque lundi matin. Les horaires fixes (10h et 17h) constituent l’unité de mesure de l’indicateur épidémiologique de rapidité. Le principe de surveillance épidémiologique établit une fourchette de délais à respecter pour chaque niveau du système de santé. Du CSPS au district sanitaire, l’heure limite est 10h. Du district au bureau régional du CISSE, les TLOH doivent être transmis le même lundi avant 17h au plus tard. Du bureau régional au MSHP, les données doivent être transmises au plus tard le mardi à 10h.
Ainsi, chaque lundi matin, les ICP des 33 CSPS du DSD doivent transmettre les données saisies de la semaine précédente au CISSE. Jusqu’à l’adoption des téléphones fixes en 1994, les TLOH étaient transmis via des moyens de transport tels que les motos. La révolution des communications provoquée par l’avènement du téléphone fixe était limitée aux grands centres urbains. Les télécentres, par exemple, n’ont pas pu pénétrer dans les villages en raison du coût d’installation. L’exclusion des villages du Burkina a entraîné des disparités dans la surveillance des maladies, notamment dans la transmission des données de santé. Des districts sanitaires aux régions sanitaires, les données TLOH étaient transmises par téléphones fixes, qui n’existaient que dans les chefs-lieux de province où étaient situés les districts sanitaires.
D’abord, c’était le téléphone fixe. Je sais qu’avec les lignes fixes, on allait dans les télécentres et on transmettait. Après cela, les téléphones portables sont devenus disponibles. […] Sinon, avant que les CSPS ne soient équipés de téléphones portables, vous savez qu’à Passoré, au début, je communiquais avec mon propre téléphone portable. Vous aviez le choix entre le télécentre ou votre propre mobile. Vous allez là où se trouve le réseau, vous appelez. […] il n’y avait qu’à Yako qu’il y avait un téléphone fixe. Donc tous les CSPS n’avaient pas de téléphone fixe. À l’époque, le téléphone était un luxe. La communication avec le fixe, c’était peut-être le district avec le niveau central ou le district avec le service interne de Yako […] mais ce n’était pas vers le CSPS.
Les agents de santé du CSPS ont dû collecter les données manuellement sur des bouts de papier, mettre du carburant dans les motos et se déplacer pour les livrer aux districts sanitaires. Ce trajet pour l’acheminement des données était financièrement coûteux et pénible pour les CSPS éloignés, notamment ceux situés à plus de 50 km avec des routes dégradées, comme les CSPS de Lahirasso, Kimini et Koroba.
Quand j’ai quitté l’école en 1986, il n’y avait pas de téléphone. Alors notre TLOH, Télégramme-lettre officielle hebdomadaire, pour la déclaration des maladies à déclaration obligatoire, vous la rédigiez après et vous preniez votre moto pour retourner au centre afin de la remettre au responsable. (Gestionnaire, PEV régional)
À l’échelle nationale, les transmissions des données n’étaient pas homogènes. Dans les districts sanitaires où servaient certains de nos interlocuteurs (infirmiers diplômés devenus ICP CSPS dans le DSD ou responsables régionaux du PEV), les agents de santé (l’ICP ou tout autre agent désigné) allaient eux-mêmes remettre les données hebdomadaires. Dans d’autres districts sanitaires, des agents désignés par les CISSE faisaient le tour des CSPS pour collecter les TLOH. D’autres systèmes ont été développés, obligeant les CSPS à s’organiser de telle sorte que l’infirmier du CSPS le plus éloigné collecte les données des autres CSPS sur le même trajet, au fur et à mesure de sa progression vers le district.
J’étais infirmière en chef. En février 1996 […]. À l’époque, il existait un système organisé au niveau des quartiers. Autrement dit, chaque lundi matin, il y avait un agent qui quittait le quartier et faisait le tour des formations sanitaires pour récupérer les TLOH. Ainsi, il se rendait dans chaque formation sanitaire, et vous, vous rédigiez votre TLOH et vous le lui remettiez. Il le rapportait le soir au niveau du district et les compilait, et le niveau du district était ainsi informé. C’était comme cela en 1997-1998. C’était organisé de telle façon qu’il y avait un agent qui faisait le tour de toutes les structures sanitaires pour récupérer le TLOH. C’est vrai que chaque quartier avait sa propre organisation. Dans certains districts, c’est l’infirmier en chef du poste le plus éloigné qui récupérait le TLOH auprès des autres structures sanitaires. Mais c’était fait de telle façon que c’était sur le même axe. […]. (Gestionnaire, PEV régional)
Sur la base de ce qui précède, ces pratiques de communication dites traditionnelles ont même perduré jusqu’en 1997-1998, alors que la téléphonie mobile a été adoptée en 1996 au Burkina Faso (Ouedraogo, 2004). Compte tenu de l’importance des indicateurs de rapidité et d’exhaustivité en épidémiologie, on a alors tenté d’innover avec le système téléphonique filaire pour permettre aux CSPS de télécommuniquer avec les districts sanitaires. Au lieu d’adaptations contextuelles fondées sur l’effort humain, le ministère de la Santé a mis en place le « RAC », un système de communication conçu exclusivement pour permettre aux CSPS les plus éloignés des districts d’être prompts à transmettre les TLOH. Selon les infirmiers qui ont vu le RAC sans en faire l’expérience, c’était comme un télécentre fonctionnant avec une antenne. À cet effet, un CSPS a été désigné pour l’héberger, en fonction de sa localisation médiane par rapport aux autres CSPS avec lesquels il formait une circonscription RAC.
À l’époque, nos aînés connaissaient le RAC. Ce n’était pas facile. Le RAC était un téléphone fixe doté de grandes antennes au niveau du CSPS. Et pour appeler, je pense que lorsque vous appeliez, presque tout le monde en ligne pouvait vous entendre. C’était donc très compliqué. Et nous avons connu des agents de santé qui parcouraient des kilomètres pour transmettre le TLOH. Ils pouvaient parcourir près de 55 km. Pour transmettre le TLOH en son temps. C’était il y a quinze à vingt ans […]. (Substitut, district de santé CISSE de Dandé)
Il y avait un téléphone fixe à Yako, mais pas dans les CSPS. Je sais qu’avec les télécentres qui ont démarré, il y a eu d’abord le réseau des télécentres. Je sais qu’autrefois, nous allions dans les télécentres pour communiquer des données avant l’apparition des téléphones portables. Et là, on avait payé nos portables et on les utilisait. S’il y avait des problèmes, nous appelions le district avec […], et ensuite les CSPS avaient leurs téléphones de flotte. Sinon, autrefois […], quand j’allais à Yako, il n’y avait qu’à Yako qu’il y avait un téléphone fixe. Donc tous les CSPS n’avaient pas de téléphone fixe. À l’époque, le téléphone était un luxe. La communication maintenant avec le téléphone fixe, c’était peut-être le district avec le niveau central ou le district avec le service interne de Yako […]. Le RAC ou le carburant pour venir donner le TLOH. Parce que le RAC, ce n’était pas tous les CSPS comme je le disais. C’est la zone Bokin qui en disposait. Je pense que pour les autres CSPS c’est le carburant qu’il fallait pour assurer la transmission des données. Lorsqu’il y a une campagne, nous fournissons le carburant nécessaire pour transmettre les données. Là, chaque soir, tu partais, tu transmettais, tu revenais. C’était laborieux. Je sais que j’étais à 23 km de Yako. Chaque soir, il fallait trouver quelqu’un pour transmettre les données […]. (ICP, CSPS Dandé)
Cette « cabine téléphonique » évitait aux infirmiers de parcourir de longues distances et leur permettait de communiquer les TLOH. Cependant, les limites conceptuelles n’ont guère contribué à promouvoir l’appropriation de ce système téléphonique. Par exemple, le RAC soulevait des questionnements sur le temps d’attente des transmetteurs de données, obligés de faire la queue en respectant l’ordre d’arrivée. La communication avec le RAC posait également le problème de la correction des erreurs commises lors de la transmission des données. Une fois les données transmises et les infirmiers-transmetteurs retournés dans leurs CSPS, nous nous sommes demandé comment le récepteur du CISSE de district parvenait à corriger les données erronées. Le RAC présentait d’autres limites conceptuelles, telles que l’interférence des lignes téléphoniques entre les différents districts sanitaires du pays. Par exemple, l’infirmier du CSPS de Dandé pouvait se retrouver à communiquer avec le CISSE d’un autre district sanitaire.
En attendant, il y a le RAC. Le système RAC, c’est-à-dire que vous appelez et tout le monde entend. Nous l’avons installé de gauche à droite. C’est comme une radio. Vous y êtes, vous appelez « allo allo, voilà, voilà », et on vous intercepte. « Nous prenons vos données. » Je n’utilisais pas personnellement le RAC à l’époque. Mais à mon arrivée, certains CSPS en avaient. Apparemment, c’est un appareil de communication, mais je ne m’en souviens pas vraiment. Maintenant, c’est un appareil qui est installé avec une antenne, et quand on l’allume, on commence à appeler le district sanitaire de Dandé… Comme il y en a beaucoup, il y a des interférences. S’ils sont concernés eux aussi, ils répondent « oui oui allo », c’est le CSPS de tant de personnes […]. Ils peuvent intercepter des choses qui ne les concernent même pas […]. C’est le RAC […]. Comme une radio, il est connecté à un microphone […]. Nous ne pouvions pas l’utiliser. Mais quand […] je suis arrivé à Yako, n’étaient-ils pas deux avec le RAC ? Peut-être dans des zones reculées où il y avait des difficultés dans la zone. Certains d’entre eux se réunissaient et c’était tout. Mais ensuite, ça n’est pas allé loin. (ICP, CSPS Dandé)
Les propos de nos interlocuteurs montrent que l’ouverture des villages sur l’extérieur a été rendue possible par la téléphonie mobile dans les années 2000. À l’époque, le coût de la communication téléphonique était de « 250 FCFA [environ 0,42 USD)] la minute » et le prix des cartes de crédit était relativement cher : « C’était au moins 2 500 FCFA (environ 4,25 USD) car un an auparavant c’était 5 000 FCFA [environ 8,5 USD]. Il faut avoir 5 000 FCFA pour mettre des unités. » (ICP, CSPS Dandé). Malgré le coût élevé de la consommation mobile et des téléphones portables, qui résultaient d’un marché moins compétitif à l’époque (2000-2005), certains agents de santé avaient déjà perçu la nécessité d’intégrer cette technologie dans leurs pratiques professionnelles, et ont commencé à surveiller les maladies épidémiques « par téléphone ».
[…] Je sais qu’avec le fixe, on allait dans les télécentres pour transmettre les données. Après cela, les téléphones portables sont devenus disponibles. Maintenant, nous avons commencé à équiper les CSPS de [téléphones]. Sinon, avant que les CSPS ne soient équipés de téléphones portables, vous savez qu’à Passoré, au début, je communiquais avec mon propre téléphone portable. Vous aviez le choix entre le télécentre ou votre propre mobile. Vous allez là où il y a du réseau, vous appelez la commune et ensuite vous donnez l’information. Maintenant ça va très bien. Nous pensons que cela s’améliore chaque jour. Sinon c’est l’avantage. On voit qu’il y avait trop de gymnastique dans le passé, avec tous les risques. Tout d’abord, c’était cher, et puis il y avait tous les risques que quelqu’un prenait. (ICP, CSPS Dandé)
Le dynamisme du marché téléphonique s’est traduit par une baisse du coût des appels à 100 FCFA (environ 0,17 USD) par minute et des prix des combinés (téléphone modèle standard) à 25 000 (environ 42,5 USD), 10 000 (environ 17 USD) et même 5 000 FCFA (environ 8,5 USD). Ainsi, la plupart de nos interviewés possèdent désormais au moins deux téléphones (standard et smartphones) : « Nous avons des petits téléphones en plus de nos Android. » (ICP, CSPS Samandeni). Cette popularisation du téléphone portable par un marché plus concurrentiel a conduit la quasi-totalité des infirmiers à mettre leur téléphone portable personnel au service des unités de soin. Initialement, les moyens mobiles de transfert de TLOH étaient les appels et les messages (SMS). Tout ce dont les ICP avaient besoin était du crédit pour appeler ou envoyer ces données hebdomadaires par SMS.
C’était vraiment essentiel, car la transmission […] passe par la communication. Si on ne communique pas, je ne peux pas transmettre car la distance est compliquée. Depuis Kimini-Dandé, aller et retour, c’est 180 km. Imaginez chaque soir, je prends ma moto pour aller transmettre les données […]. Avec le téléphone, c’est rapide. Je viens d’appeler. Ça nous fait gagner du temps, c’est moins fatigant. (ICP, CSPS Kimini)
Imaginez aujourd’hui sans téléphone. Ah ! car tout en dépend désormais. Je sais qu’avant, quand nous avons commencé à travailler […], il n’y avait pas de téléphone comme ça. La flotte ne l’a pas fait. Nous avions l’habitude de mettre du carburant dans une moto pour que quelqu’un puisse aller livrer le TLOH tous les lundis matins […]. C’était donc plus cher. Imaginez 5 000 FCFA par mois, alors que quelqu’un à Banwali, s’il doit mettre du carburant tous les lundis matin pour venir transmettre les données TLOH […]. Comme vous pouvez le constater, les choses ont vraiment changé. (ICP, CSPS Dandé)
Selon nos répondants, l’utilisation de leur téléphone personnel pour effectuer les transactions TLOH leur a permis non seulement d’éviter les risques liés au trajet, mais également d’économiser et de rationaliser les ressources du CSPS. Ces pratiques individuelles ont finalement inspiré le projet de « réseau de communication pour la transmission des données de santé » du ministère de la Santé. Cette initiative a été entreprise avec le soutien du programme d’appui au développement sanitaire (PADS). Dans le cadre de la mise en place de ce réseau de communication, le PADS a équipé les établissements de santé de puces téléphoniques et d’abonnements à un système d’appels prépayés. Ce système d’appels gratuits, appelé « flotte nationale » par certains infirmiers, permet aux agents de santé de ne pas payer la consommation téléphonique lors de la transmission de leurs données :
C’est le téléphone. Chaque CSPS possède sa propre flotte, et le COGES gère la flotte du département. Au début, c’était le PADS. Ce budget a été à la charge du PADS. Désormais, c’est aux frais du COGES. (ICP, CSPS Kimini)
Selon cet enquêté, les CSPS n’ont pas reçu les téléphones cellulaires adaptés aux cartes SIM de la flotte prépayée. C’est le comité de gestion des centres de santé (COGES) qui leur a acheté les téléphones. Par ailleurs, il ressort de cet extrait d’entretien que les PADS ont supporté les frais d’abonnement à la flotte mobile pendant un certain temps, et lorsque ces frais sont devenus insupportables, le ministère de la Santé a dû recommander aux COGES de prendre en charge les frais de consommation téléphonique prépayée qui s’élèvent à 5 000 FCFA (environ 8,5 USD) par mois. Le contrat pour la flotte mobile est avec l’opérateur téléphonique Moov Africa. Les téléphones utilisés sont standards avec une seule puce et la flotte fonctionne exclusivement pour les appels téléphoniques, ce qui ne permet pas d’envoyer de SMS. Étant donné que ces téléphones sont réservés à la lettre hebdomadaire officielle de Télégram, les agents de santé les appellent « téléphones TLOH », « flotte TLOH » ou « numéros verts ».
Outre l’achat de téléphones, les CSPS sont autorisés à entreprendre d’autres projets visant à moderniser leur environnement de travail, en prélevant des ressources financières sur les bénéfices générés par la tarification des actes de santé. Pour ce faire, le COGES doit obtenir l’accord de l’équipe-cadre du district (ECD) avant d’exécuter toute dépense dépassant 25 000 FCFA (environ 42,5 USD). Lors de notre travail de terrain, nous avons constaté que le CSPS de Dandé avait pu acquérir un ordinateur et une imprimante.
C’est le SMC. Nous avons fait une demande auprès de la commune. Ils ont vraiment approuvé et puis le COGES a acheté ça : l’ordinateur. Puis vint l’imprimante […]. Selon les règles du COGES, lorsque vous souhaitez dépenser plus de 25 000 FCFA, vous devez en faire la demande à la hiérarchie qui approuve en fonction de votre capacité financière. (ICP, CSPS Dandé)
À part Dandé, aucun autre CSPS n’a pu mettre en œuvre de tels projets. En effet, malgré l’ambition du ministère de promouvoir les solutions TIC dans le système de santé, les CSPS ne bénéficient des puces téléphoniques que depuis l’adoption de la stratégie e-santé. C’est aussi le seul téléphone standard que la plupart des COGES ont pu proposer à leurs CSPS du district de Dandé. Le téléphone TLOH est même utilisé pour tous les autres services de santé. Cependant, lorsqu’il s’agit de surveiller des maladies épidémiques, de nombreuses pratiques médicales nécessitent rapidité et interactivité. Face à l’absence de l’État dans la mise en œuvre de la politique de e-santé, les agents de santé se retrouvent contraints d’innover avec leurs propres outils. La section suivante analyse les innovations des infirmiers dans le système de surveillance épidémiologique.

Gestion des innovations émanant du système de gestion des TLOH


Compte tenu du manque de financement pour la mise en œuvre des activités telles que décrites dans la politique de e-santé, les professionnels de santé sont obligés d’initier des actions leur permettant de réaffecter les activités dans le cadre de la gestion des TLOH. Dans un premier temps, les appels passés avec la flotte mobile étant au cœur des échanges de données hebdomadaires entre les CSPS et la circonscription, il s’avère qu’en raison du problème récurrent de faible signal du réseau, certains ICP échangent des puces téléphoniques pour envoyer des SMS ou appeler le numéro personnel du CISSE. Les numéros utilisés appartiennent aux ICP. Ces numéros personnels n’étant pas enregistrés dans le système de la flotte mobile, les ICP sont contraints de supporter le coût des appels et des SMS.
La difficulté ici est la communication, et les réseaux sont tels qu’ils sont aujourd’hui. Il y a souvent un problème de réseau. Vous savez, il existe des TLOH pour lesquels nous sommes souvent obligés d’utiliser d’autres numéros. Si c’est le Telmob qui a des problèmes, il faut passer par d’autres réseaux qui n’existent pas [la flotte]. Ce sont vos unités que vous utiliserez pour appeler. Ça fait un, et deux, il y a aussi des CSPS où je ne sais même pas ce que c’est le TLOH, ce sont des numéros Telmob, alors qu’il se trouve qu’il y a des zones où il n’y a pas de Telmob, c’est Airtel. C’est désormais à l’ICP de trouver les moyens d’appeler avec les numéros Airtel. (ICP, CSPS Dandé)
Les difficultés se situent au niveau des hameaux de cultures. Je peux souvent appeler mon ASBC cinq fois par jour sans pouvoir le joindre car il n’y a pas de réseau. Mais Kimini ici va bien pendant un moment. Ce sont tous les réseaux. Mais j’utilise principalement Telmob car c’est le plus fiable, même s’il y a des difficultés. En cas d’urgence, il faut se déplacer pour voir. Surtout à Silgassé. (ICP, CSPS Kimini)
De telles pratiques ont été observées lors de nos travaux sur le terrain, notamment au CISSE. À titre d’illustration, le 12 février 2019, un lundi matin à 8h48, nous avons retrouvé le responsable suppléant du CISSE dans son bureau, assis sur une chaise, un smartphone dans la main gauche : « J’ai jusqu’à 10h pour tout enregistrer et jusqu’à 17h pour l’envoyer au niveau régional. » Il récupérait les TLOH. Il les recevait des ICP et les saisissait en même temps dans son ordinateur. Lorsqu’il remarquait des incohérences statistiques, il prenait un stylo rouge pour faire des additions ou des soustractions, et interrogeait directement les ICP concernés sur les erreurs dans leurs calculs. En raison de la saturation des appels sur le numéro de la flotte mobile du « remplaçant », certains ICP l’ont appelé et d’autres lui ont envoyé des SMS sur son (ses) numéro(s) personnel(s). Les ICP qui envoyaient les SMS étaient généralement ceux qui essayaient d’appeler en vain à cause du réseau ou de la file d’attente des appels. Tout le monde a essayé d’être prompt dans la « télécommunication » TLOH. Jusqu’à 10h, lorsqu’il n’avait pas reçu les données de tel ou tel CSPS, il les rappelait pour les récupérer. Il rappelait également les émetteurs du SMS pour accuser réception des données envoyées.
Le lundi matin de la semaine suivante, chaque ICP […] tente de joindre le responsable CISSE qui dispose de son masque de saisie TLOH. Chaque ICP transmet soit par appel, soit par SMS. (Substitut, CISSE du district de santé de Dandé)
C’est selon un certain nombre d’heures, normalement au plus tard à 10h, ce que nous transmettons au district tous les lundis. Donc, si vous terminez votre TLOH, vous arrivez le matin, vous parvenez à calculer votre TLOH, vous appelez la circonscription ou vous appelez le CISSE. Il faut souvent insister. Il existe de nombreux CSPS. Il faut souvent insister deux ou trois fois. Si vous l’appelez et qu’il est en ligne, vous devez attendre […]. (ICP, CSPS Dandé)
L’analyse des adaptations en l’absence de solutions TIC par le haut implique de mettre en lumière les pratiques locales à l’ère de la convergence numérique. WhatsApp, par exemple, est apparu comme une stratégie palliative au problème des files d’attente et du réseau instable. Dès le dimanche soir, les ICP transfèrent leurs TLOH pour ne pas avoir à « se battre » le lendemain. Les utilisateurs de cette application la trouvent préférable au SMS, car elle dispose d’un système de preuve irréfutable de réception ou de non-réception d’un message envoyé.
À l’heure actuelle, nous utilisons le téléphone car, comme je l’ai dit, le TLOH consiste avant tout à transmettre des informations par téléphone. Avec la simplicité des choses, comment dire, même les formulaires de surveillance des maladies, il y a des moments, avant même que l’échantillon ne sorte, on remplit le formulaire d’enquête, on l’envoie par WhatsApp. Nous le scannons et l’envoyons. Et même le TLOH. Les gens, au lieu d’appeler et de commencer à dicter là-bas, scannent simplement la page de la semaine qu’ils ont déjà remplie et envoient sur WhatsApp. Nous avons créé un groupe appelé « TLOH ». (ICP, CM Bama)
Selon cet ICP, outre le TLOH, plusieurs autres types de données épidémiologiques sont dématérialisées via cette technologie WhatsApp. Il s’agit notamment de celles sur les patients recueillies après la détection d’une maladie au CSPS et enregistrées sur les fiches de suivi, ainsi que des données recueillies par le biais des fiches d’enquête. Le groupe WhatsApp « TLOH DS DANDE », comme son nom l’indique, est exclusivement dédié à l’envoi de données TLOH. L’observation des interactions montre par ailleurs que certains ICP envoient leur TLOH sur le compte personnel WhatsApp du remplaçant du responsable du CISSE.
Dans le cadre de la surveillance du Covid-19, la numérisation des informations de santé via WhatsApp a été pratiquée, et s’est concentrée, par exemple, sur les données vaccinales. Le 18 juillet 2021, dans un autre groupe WhatsApp, nous lisons le message suivant : « Bonsoir cher ICP, juste pour vous informer que les données Covid-19 seront désormais collectées en même temps que TLOH. Merci pour vos efforts. » (Du responsable CISSE, groupe « INFO_CISSE DS DANDE »).
Suite à ce message, certains ICP ont posté leurs données de vaccination sur « INFO_CISSE DS DANDE ». Après avoir observé les interactions au sein de ce groupe, du 3 avril 2020 (date de notre adhésion) au 15 novembre 2021 (date de notre retrait du groupe), nous avons également constaté qu’il y avait des ICP qui transféraient leurs TLOH dans ce groupe WhatsApp alors qu’il était recommandé de les envoyer au groupe « TLOH DS DANDE » consacré exclusivement au partage d’informations liées au système de santé. En revanche, nous avons remarqué que dans les deux groupes, les données étaient communiquées sous forme de manuscrits pris en photo, de fichiers Excel ou Word, ou encore par retranscription directe des données. Jusqu’à présent, nous constatons que le bricolage effectué par les agents de santé s’adapte au peu de smartphones fournis par l’État et aux limites des « téléphones TLOH », qui ne permettent pas aux agents d’appeler d’autres numéros que ceux enregistrés dans le système d’appel prépayé gratuit, encore moins d’écrire des messages entre les numéros de la flotte mobile et ceux personnels. Face à ces « bricolages adaptatifs » (Domínguez-Guzmán et al., 2022), nous pouvons décrire les agents de santé comme des « bricoleurs-adaptants » ou des « acteurs-bricoleurs » qui se débrouillent avec ce qu’ils ont pour dépasser les limites du système « flotte TLOH ».   

TIC personnelles : utilisations dans d’autres domaines de la surveillance épidémiologique


Nos observations montrent que leurs pratiques de santé mobile englobent presque tous les autres aspects de la surveillance épidémiologique, y compris les informations et les connaissances biomédicales essentielles au système de vigilance sanitaire. C’est le cas du DSD où, au lieu des dispositifs techniques fournis par l’État, les agents de santé utilisent leurs TIC personnelles pour accéder aux informations sur la santé. Pour ce faire, ils se connectent à Google ou Facebook pour obtenir des informations. Ces outils numériques leur permettent de se tenir au courant des profils épidémiologiques des maladies émergentes dans le monde. L’exemple illustratif est que jusqu’à ce que le Covid-19 se répande au Burkina Faso – même pendant qu’elle sévissait à l’échelle nationale –, les agents de santé surveillaient régulièrement son évolution dans le monde entier. Ces informations sont également partagées à travers le groupe « INFO_CISSE DS DANDE » qui reste le canal privilégié des agents de santé pour partager ce type d’informations.
Dans le cas du Covid, la plupart des informations que nous avons obtenues sur la maladie se trouvaient sur le Net. C’est au téléphone qu’on lisait, sinon on peut bien le dire maintenant, c’est la fiabilité de cette information qui reste à vérifier. Mais comme ce sont les informations dont nous disposons, nous nous y appuyons. Nous nous fondons également là-dessus. Lorsqu’il y a des informations, par exemple sur le Covid-19, nous les partageons. Par exemple, on trouve fréquemment des notes d’information sur le nombre de cas, le nombre de décès. Chaque jour, ils sortent. Dès que quelqu’un reçoit l’information, il la partage avec le groupe, et chacun a alors une idée de la situation : nombre total de cas enregistrés dans le pays, nombre total de guérisons, nombre total de décès, etc. (ICP, CM Bama)
Le CISSE a également constitué un groupe, tout comme la pharmacie, et c’est au niveau du district. Mais il existe également d’autres groupes dans lesquels je suis actif et où nous partageons des informations. Dans le cas du Covid, je l’utilise surtout lorsqu’il y a de nouvelles informations. Nous les recevions via les TIC. (ICP, CSPS Faramana)
Comme on peut le déduire des citations ci-dessus, compte tenu de l’insécurité sanitaire dans un contexte de coronavirus, la communication électronique a été recommandée par le ministère de la Santé à son personnel (note d’information No 2020/0386/MS/SG/DRH/SAD publiée sur le groupe « INFO_CISSE DS DANDE »). Selon les informateurs, cette communication via WhatsApp induit une sorte d’équité d’accès à l’information, car elle contourne les difficultés géographiques (distance à parcourir, aléas routiers, risque d’accident) que rencontrent certains CSPS avec les moyens de transport traditionnels (moto, tierce personne interposée). Sans avoir à se déplacer, les agents de santé recevaient des notes d’information, des rapports de situation, des formulaires de notification sur le profil épidémiologique du Covid-19 au Burkina Faso, et des protocoles de gestion de cette urgence sanitaire mondiale. Les informations reçues par voie numérique du ministère de la Santé couvraient également la stratégie de réponse à adopter et la campagne de vaccination contre la pandémie.
D’autres aspects de la surveillance épidémiologique infiltrés par les pratiques de e-santé comprennent la surveillance de la santé et la gestion des personnes atteintes de maladies. Dans le cadre de ces activités, les agents de santé doivent reconnaître les signes cliniques des maladies épidémiques, être capables de les détecter lors des soins curatifs et de les traiter selon les protocoles de prise en charge. Cependant, le niveau de maîtrise de ces maladies reste (parfois) théorique pour la plupart des agents de santé. Lors de nos échanges avec les ICP, il est ressorti que la majorité des infirmiers en poste au DSD n’ont reçu qu’une formation de base à l’École nationale de santé publique (ENSP) et n’ont pas suffisamment d’expérience, car avec le PEV, les maladies potentiellement épidémiques sont devenues rares. Afin de pouvoir diagnostiquer ces maladies et administrer les médicaments adaptés aux patients, certains agents de santé sont obligés de demander l’aide d’un collègue ou d’un supérieur via les technologies de téléconsultation (appels téléphoniques, appels vidéo ou envoi de photos des patients via WhatsApp), ou d’effectuer des recherches Google sur les maladies auxquelles ils sont confrontés.
Il y a des photos que les ICP m’envoient souvent sur WhatsApp. Par exemple, un ICP peut soupçonner un cas de rougeole, mais il n’est pas sûr qu’il s’agisse bien de la rougeole. Pour avoir la confirmation, il prend des photos du patient et me les envoie sur WhatsApp, et quand je les regarde, je peux lui dire s’il s’agit d’un cas de varicelle ou de rougeole. Voici un exemple. À [XXX], l’ICP a eu un enfant présentant une éruption cutanée généralisée. Un enfant de 5 ans […]. Maintenant, il avait peur que ce soit la rougeole. J’ai dit : « Eh bien, si vous n’êtes pas sûr, puisque vous avez WhatsApp, vous pouvez prendre une photo et me l’envoyer. Je vais jeter un coup d’œil pour vous rassurer. » Et quand il l’a fait, j’ai regardé et j’ai vite compris qu’il ne s’agissait pas d’un cas de rougeole. J’ai réalisé que c’était un cas de furoncles. Cela signifie que certains enfants naissent dans la chaleur et que des vésicules apparaissent sur leur corps. Je lui ai rapidement dit que ce n’était pas la rougeole. (Substitut, CISSE du district sanitaire de Dandé)
Prenez la rougeole, par exemple. Vous pouvez entrer le nom et nous vous donnerons des détails sur la maladie, des explications, la période d’incubation, plein de détails en tout cas. Quand j’ai eu le cas, en tout cas, j’ai essayé d’aller sur Internet pour en savoir plus sur la maladie. Sur Internet, plus de détails sont donnés. En rentrant chez moi, on m’a dit que ça attaquait les yeux. En attendant, ça change la coloration. À l’école, on ne rentre pas assez dans les détails. Nous faisons des recherches sur d’autres maladies comme la polio, par exemple. Surtout pour les maladies PEV, j’y vais souvent, je tape le nom et ils me donnent les détails. (Responsable PEV, CSPS Kimini)
La surveillance épidémiologique comprend également des investigations dans les lieux où surviennent des maladies épidémiologiques. Cette étape consiste à visiter le domicile des malades pour voir s’il y a d’autres personnes contaminées. L’enquête s’accompagne d’une campagne de sensibilisation sur les précautions intra-résidentielles à prendre comme la mise en quarantaine des malades et l’interdiction d’utiliser leurs objets ou leurs vêtements. Dans le cadre d’une enquête, les ASC prennent en charge la surveillance communautaire et interagissent avec les agents de santé. Dès qu’une maladie épidémique est suspectée, les activités épidémiologiques de ces relais communautaires incluent l’identification des foyers des malades et des agents de santé qui les accompagnent pour une première enquête nommée « enquête primaire ». Cette enquête est dite primaire car elle est réalisée en premier lieu par les acteurs locaux en charge de la santé dans les villages où sévit la maladie : infirmiers et ASBC. Elle est réalisée en continu par les ASBC dans les quartiers jusqu’à ce que le nombre de cas suspects oblige les autorités sanitaires du district (médecin-chef du district – MCD –, CISSE, responsable PEV) à mener une autre enquête. Cela se fait par la recherche dans les registres de consultation d’autres cas de la maladie suspectée grâce à des signes cliniques, et par la visite des familles touchées par la maladie, dans le but de déclarer ou non une épidémie. Les ASBC participent à cette enquête finale, accompagnant l’équipe d’enquête dans les ménages, faisant parfois office de traducteurs, et apportant des réponses à certaines questions, notamment sur la participation des mères d’enfants infectés au PEV. Si les enfants infectés n’ont pas été vaccinés, les ASBC sont chargés de les mobiliser pour leur donner des doses de vaccin non reçues, organisé par le CSPS. Nos données discursives montrent que dans les localités éloignées, les agents de santé utilisent les TIC pour interagir avec les parents des patients et les ASBC.
Quand on parle de communauté, ce n’est plus la flotte. Il devient le téléphone personnel que vous utilisez. C’est un appel local aux agents de santé communautaires en charge de la zone […]. L’ASBC en charge de la zone est dans le quartier Mossi. […] Je l’appelle et il vient voir la concession de temps en temps […]. Ce cas [de rougeole], disons […] qu’on donne des informations sur les personnes déplacées. Nous avons dû passer quelques appels. On l’appelle, on lui dit : « Bonjour, il y a eu un cas qui est venu en consultation, tu peux venir voir ? » Ou nous prenons contact avec la personne concernée si nécessaire. Mais c’est l’ASBC qui se charge de nous accompagner dans la cour. Ils en savent plus sur les maisons des gens que nous […]. (PCI, CSPS Samandeni)
Comme le suggère la citation ci-dessus, les interactions communautaires virtuelles entre les infirmiers et les ASBC, qu’ils décrivent comme « leurs yeux et leurs oreilles », reposent sur des appels téléphoniques, la communication numérique n’étant pas suffisamment développée dans les villages. L’utilisation du téléphone personnel contribue à contenir la propagation d’une maladie suspectée, car elle permet d’anticiper les actions. Il faut toutefois souligner que les ASBC ne reçoivent pas de téléphone des COGES, pour toute télécommunication avec les agents de santé, ils utilisent leurs propres téléphones et supportent le coût des appels qu’ils passent. Lorsqu’ils n’ont plus de crédit, ils bipent les agents de santé qui les rappellent, tout en payant le coût de la communication.
J’utilise mes propres téléphones […] car l’ASBC n’a pas de flotte […]. S’ils avaient eux aussi une flotte, nous pourrions communiquer avec la flotte de l’CSPS. Mes unités sont sur mon portable donc je peux les contacter […]. (Officier du PEV, CSPS Lahirasso)
Nous payons nos unités de notre propre poche et souvent il arrive que nous n’ayons même pas d’argent […]. Ce n’est que le 7 janvier 2020 que nous avons été payés six mois depuis janvier 2019 et il reste encore 6 mois. (ASBC, CSPS Kimini)
Au-delà de l’analyse des extraits d’entretiens, il convient de préciser qu’il ne s’agit que de cartes SIM que les ASBC ont reçues de l’État pour le transfert de leurs motivations financières de 20 000 FCFA (environ 32,11 USD). Ces « salaires mensuels » ne sont même pas payés de façon régulière par leur employeur, l’État. Ainsi, qu’il s’agisse d’appels ou de SMS, il s’avère que les factures (unités et mégadonnées) sont supportées par les agents de santé et dans une moindre mesure par les ASBC ; ce qui renforce encore les sacrifices des acteurs de la santé périphérique dans l’application de la santé mobile dans le système de surveillance des maladies.
Le téléphone ? C’est comme ça qu’on communique, les ASBC, les autres CSPS. Nous utilisons nos propres ressources. Le major possède une flotte. La flotte elle-même est au niveau du district. Ce n’est pas avec les agents de base [les ASBC]. (PCI, CSPS Kimini)
En revanche, lorsqu’une maladie est suspectée dans une localité éloignée (un village ou un hameau agricole), certains agents de santé interagissent par téléphone avec les proches des patients. Il leur suffit d’être nombreux pour surmonter les contraintes spatio-temporelles récurrentes qui freinent l’efficacité des stratégies de veille épidémiologique. Ce fut le cas de la prise en charge de la rougeole dans la famille d’un agriculteur habitant un hameau agricole à 2 km du CSPS de Dandé. Sept enfants étaient soupçonnés d’avoir contracté la rougeole. Une fois les premiers cas portés au CSPS, le téléphone a été utilisé pour informer le village et recommander que d’autres enfants présentant des symptômes de rougeole soient amenés au CSPS.
Nous avons utilisé le téléphone pour contacter les parents, car apparemment c’était la mère qui était la première à venir avec l’enfant, et nous avons pris le numéro du père avec la mère et avons ensuite contacté le père. Comme le père était là, nous avions besoin de quelques renseignements de sa part. Étant au CSPS, il a appelé chez lui pour demander ce que les enfants avaient mangé. Avec qui ils couchent. (Responsable PEV, CSPS Dandé)
C’est la notification puis l’échange avec les parents. Si nous en avons besoin, nous les appelons […]. Les échanges peuvent être des rendez-vous. Quand les choses ne vont pas bien, quand nous avons besoin d’informations sur les cahiers, etc., nous appelons parce qu’il y a des enfants là-bas et nous n’avions aucune information. Il fallait retrouver les carnets, c’est tout […] Nous avons pu retrouver certains enfants. Maintenant qu’il a trouvé les cahiers, il les a apportés. C’est l’essentiel. C’était à Dandé [ce cas de rougeole]. (ICP, CSPS Dandé)
Bien qu’il s’agisse du seul exemple d’utilisation des TIC entre infirmiers et population dans le cadre de la surveillance épidémiologique, on peut déduire que la faible fréquence des interactions mobiles et numériques entre soignants et patients s’explique par la rareté des épisodes épidémiques. Cela se justifie également par le fait que les infirmiers utilisent de plus en plus le téléphone dans leur prestation quotidienne de soins aux patients.
Nous avons les numéros des ASBC. Ils sont l’interface entre nous et la communauté. Souvent, les patients passent par eux pour nous joindre. Dans certains cas, il dira : « Ah ! Major : voilà une affaire. La personne est là. Elle est gênée de venir. » (ICP, CSPS Dandé)
Ainsi, en plus d’être les yeux et les oreilles du système de santé dans leurs communautés, les ASBC agissent également comme médiateurs pour rapprocher les gens des services de santé. Ces ASBC utilisent leurs téléphones personnels comme télécentres au service de la santé communautaire pour faciliter le contact entre les agents et ceux qui recherchent des services de santé. Cet usage partagé du téléphone est pratiqué par les agents de santé dans les centres de santé. Généralement, les numéros de téléphone des accompagnants des patients sont inscrits dans les registres de consultation. Pour faire face à certaines urgences, les agents portent secours à certains accompagnants qui n’ont pas de téléphone ou qui n’ont plus de crédit d’appel. Ces astuces pour inventer des modes communautaires d’appropriation des TIC font du téléphone un bien public et non plus un bien privé. De tels bricolages de la part des agents de santé ne s’adaptent pas aux limites des solutions numériques proposées pour faciliter les activités de surveillance communautaire ou la réponse à une épidémie potentielle. Ils sont plutôt innovants dans le sens où ils comblent le vide laissé par l’absence d’infrastructure numérique étatique. Puisque les agents de santé remplacent l’État en faisant de la bricole avec leurs téléphones, leurs crédits de communication et leurs mégadonnées, cette « façon de faire » peut être qualifiée de bricolage, et élève par la suite les agents de santé au rang de bricoleurs.


Discussion


L’objectif de cet article était d’étudier comment les téléphones portables sont utilisés dans le cadre de la surveillance épidémique et des soins de santé dans le district sanitaire de Dandé (DHD). Au vu des éléments d’analyse, plusieurs systèmes de communication mobiles et numériques à la disposition des agents de santé sont appliqués à la surveillance des maladies potentiellement épidémiques. Il s’agit notamment du téléphone (appels et SMS), d’Internet et de WhatsApp. Au vu des résultats obtenus, ces technologies ouvrent de nouveaux horizons pour le renforcement des capacités des professionnels de santé. Surtout, elles transforment les pratiques de prise en charge des maladies en permettant aux soignants de téléconsulter collègues et supérieurs et de participer activement à la production de connaissances. La santé mobile via WhatsApp, en hausse dans le DSD, prouve encore que les TIC favorisent l’autonomie des professionnels de santé, comme le démontrent d’autres études (Duclos, 2013 ; Ngabo et al., 2012).
Pour discuter des résultats, nous devons nous concentrer sur les concepts de bricolage, d’adaptation et de bricolage adaptatif. En référence à la théorisation léguée par Mol (2008), il faut dire que dans le cadre de cette recherche, le concept de bricolage désigne une variante hétérogène des efforts déployés par les agents de santé dans le processus de numérisation du système de surveillance des maladies potentiellement épidémiques. Tout aussi différent de l’adaptation, nous avons vu comment le bricolage peut être adaptatif, comme le montre la théorisation de Domínguez-Guzmán et al. (2022).
La notion de bricolage adaptatif signifie, dans notre contexte, que les agents de santé ont adopté des stratégies alternatives aux défis technologiques rencontrés par le téléphone TLOH. Contrairement au bricolage adaptatif, le bricolage fait « simplement » référence à la forme de santé mobile informelle qui émerge pour compenser l’incapacité de l’État à fournir des solutions TIC comme promis en 2016 (MSHP, 2016). En effet, le bricolage consiste à utiliser des technologies personnelles pour améliorer la surveillance des maladies en cas de manque d’infrastructures publiques. Le bricolage devient adaptatif lorsqu’une médiation inventive avec les TIC personnelles est initiée en réponse aux difficultés d’utilisation des infrastructures proposées par l’État pour une amélioration optimale de la surveillance épidémiologique.
Nos enquêtes montrent que le bricolage du téléphone et de WhatsApp est une entreprise collective des agents de santé, pour la simple raison que ces technologies sont ancrées dans le quotidien et modifient fondamentalement leurs conditions de travail. Ces mesures collectives de bricole ou de bricolage contribuent à améliorer la surveillance des maladies, mais parmi ces bricoleurs et bricoleurs collectifs, on ne parvient pas à identifier les innovateurs.
Cependant, dans le cas du TLOH, on sait bien que le ministère a été l’innovateur avant que le CSPS ne prenne en charge le financement de la flotte mobile. On sait aussi que le CISSE a initié la création de groupes WhatsApp. Compte tenu de l’existence de ces groupes nationaux, il est impossible de dire qui est à l’origine de l’introduction de ce média dans le système de santé. Cependant, nous pouvons affirmer avec certitude que tous ces bricolages collectifs sont informels et montrent les limites de la capacité financière ou, pour parler franchement, le manque de volonté de l’État de moderniser le système de santé grâce aux TIC. C’est dans ce sens que nous convenons que le bricolage est coproduit par l’État et la société (Benouniche et al., 2014 ; Mayaux et al., 2023). Dans la surveillance et la réponse aux maladies, la bricole et le bricolage sont des processus continus impliquant de multiples acteurs (ICP, gestionnaires de données et, dans une moindre mesure, ASC) interconnectés pour surveiller les maladies et produire des données à différents niveaux du système de santé dans le DSD.
Concernant le système de gestion des données de santé, au vu des interactions observées à travers les groupes WhatsApp, on peut en déduire que les TIC ont institué un schéma de communication transformant les émetteurs TLOH et leurs récepteurs en producteurs de données épidémiologiques. Le rôle des infirmiers du CSPS ne se limite plus à remplir des formulaires papier, mais inclut une certaine activité autour des données numérisées. Modifiant radicalement le « système nerveux » (Nora & Minc, 1978) de la surveillance épidémiologique, cette technologie réduit le décalage spatial et temporel entre la collecte et le transfert des données (Ganesan et al., 2012 ; Matthew et al., 2007). L’application WhatsApp s’est donc révélée indispensable dans la réponse nationale au coronavirus. Comme l’ont montré plusieurs études de recherche sur les TIC en contexte pandémique, les approches mises en œuvre sont la communication numérique, les initiatives éducatives numériques et les solutions numériques de gestion des patients (Lau et al., 2020 ; Schwamm et al., 2020). Ces approches, dans le contexte de nos recherches, ont également abordé la nécessité de promouvoir les distances sociales et de protéger les travailleurs de la santé (Kichloo et al., 2020 ; Robbins et al., 2020 ; Wood et al., 2021).
Même si entre-temps les autorités sanitaires ont recommandé l’utilisation des TIC pour la gestion spécifique du Covid-19, notre analyse montre qu’il s’agissait d’une sorte de formalisme, dans la mesure où la recommandation n’a été suivie d’aucune mesure d’accompagnement spécifique. Au lieu de cela, un partenaire au développement, l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), a fourni au CISSE des tablettes pour gérer les données sur le Covid-19, mais pas aux agents de santé qui collectent les données au niveau local et qui sont confrontés à des difficultés dues à la distance, aux conditions routières, etc. Cela témoigne du fait que les interventions expérimentales de santé mobile en Afrique, financées par des ONG (Friederici et al., 2020 ; Njoroge et al., 2017 ; Poggiali, 2016), ne sont pas inclusives (Neumark, 2020 ; Prince, 2020). Cette fragmentation des projets expérimentaux est parfaitement illustrée par le projet RAPISMS, qui a équipé les CSPS de tablettes de gestion des dépôts pharmaceutiques, sans pour l’instant inclure les activités liées à la surveillance des maladies potentiellement épidémiques.
Étant donné le caractère fragmenté des projets numériques verticaux, les personnels soignants situés en périphérie du système de santé sont obligés de bricoler les moyens technologiques dont ils disposent. Comme le montrent les résultats, les adaptations impliquent des sacrifices personnels en termes de consommation téléphonique et Internet. Il ressort que ce que Chib et al. (2014) ont qualifié de « santé mobile informelle » est soutenu par les infirmiers du DSD. C’est le cas des agents de santé qui utilisent leurs téléphones portables personnels pour fournir divers services numériques (Blaschke & Lucas, 2017 ; Hampshire et al., 2017). Ces usages informels des technologies numériques dans la surveillance épidémiologique montrent que les critiques adressées aux TIC, incapables de justifier l’optimisme placé en elles (Friederici et al., 2020), ne concernent que les projets top-down des ONG. Au lieu de solutions TIC verticales, ce sont les efforts personnels des agents de santé qui dynamisent le système de surveillance des maladies, le rendant plus efficace et plus rentable, et rendant les données épidémiologiques plus accessibles. Dans cette logique de substitution à une infrastructure nationale de e-santé, les usages informels des TIC favorisent l’émergence d’une culture numérique, une communication rapide moins formelle, des échanges immédiats et un travail coopératif (Silva & Ben Ali, 2010).
De nombreuses études se sont penchées sur l’appropriation des TIC telles que les téléphones et les logiciels interactifs dans le système de santé du Burkina Faso. Ces études se sont principalement concentrées sur des projets de développement verticaux menés par des ONG ou des centres de recherche (Arnaert et al., 2019 ; Sanou et al., 2016 ; Sawadogo et al., 2021). Cependant, peu de projets mis en œuvre ont expérimenté l’utilisation de WhatsApp. Pourtant, nos résultats montrent que l’application devient la technologie numérique rurale qui contribuera à la mise en place d’un système d’information intelligent sur la santé.
Étant donné que les efforts de numérisation dépendent de l’initiative personnelle des agents de santé, on peut dire qu’un système de télésurveillance alternatif a été construit à partir de l’utilisation réelle des TIC par les agents de santé du district sanitaire de Dandé. Ces pratiques de télésurveillance des épidémies s’appuient sur la maîtrise de la culture numérique et la « représentation partagée » (Olivier de Sardan, 1998) qui sous-tend les discours et comportements « non observateurs » des soignants (Olivier de Sardan, 2022). Cette image bien ancrée des TIC se justifie en outre par le fait que leurs usages concernent les interactions avec les ASC et, de plus en plus, celles avec les populations bénéficiant des services de santé.
L’analyse des dysfonctionnements du RAC et du téléphone TLOH a montré que les projets verticaux peinaient à répondre aux enjeux centraux du système de santé. L’« épreuve des contextes », subie par ces TIC dans le DSD de 1996 à nos jours, porte sur la problématique du réseau téléphonique, le faible niveau de solutions TIC dans les établissements de santé et la dépendance du développement de l’infrastructure numérique à l’aide extérieure. Le fait même qu’il existe un décalage entre les normes officielles de ces technologies numériques et les pratiques courantes du personnel soignant a fait émerger une expertise du quotidien. Cette expertise contextuelle a permis d’apprécier les CSPS du DSD dans la recherche des indicateurs de rapidité et d’exhaustivité si chers au système SIMR. C’est la « revanche des contextes » dans lesquels s’inscrit l’ingénierie de la e-santé. Cette revanche contextuelle s’explique par le fait que les infirmiers sont critiques à l’égard des conditions quotidiennes de surveillance des épidémies qu’ils connaissent directement et souhaitent innover pour compenser les insuffisances des solutions verticales TIC (Lasdel, 2023).
Cela sous-tend les réformes internes menées par les agents de santé en utilisant leurs propres ressources. Ces innovations se sont déroulées progressivement et en cohérence avec la dynamique appropriative des TIC et ont permis aux innovateurs contextuels de s’adapter à la problématique de correspondance entre les cartes SIM de la flotte mobile TLOH et les téléphones personnels, et au contexte d’insuffisance et, parfois, même en l’absence de réseau. Ils ont également permis à ces « réformateurs de l’intérieur » de résoudre le problème des files d’attente pour les appels téléphoniques et des risques de retard dans la transmission des données hebdomadaires. D’où des normes pratiques comme l’utilisation de smartphones personnels à la place du téléphone TLOH (Olivier de Sardan, 2003).


Conclusion


Notre analyse montre que, en réponse à l’incapacité de l’État à doter les établissements de santé de solutions TIC, les agents de santé investissent leurs ressources technologiques personnelles pour rendre le système SIMR plus efficace et plus rentable en termes d’indicateurs épidémiologiques tels que la rapidité dans la transmission et l’exhaustivité des données. Ces pratiques informelles de surveillance des maladies potentiellement épidémiques appellent ainsi l’État à construire une infrastructure numérique publique indépendante des approches des projets d’ONG qui se révèlent jusqu’ici fragmentées et exclusives vis-à-vis des CSPS, lieux de production des données, de surveillance active des maladies épidémiques et de mise en œuvre de stratégies de réponse à toute épidémie qui pourrait être déclarée.
Même s’il s’avère que l’État est quelque peu incapable de construire seul une telle infrastructure, et qu’il a besoin de l’aide de partenaires techniques et financiers comme les ONG, il devrait néanmoins donner, selon nous, la priorité aux établissements de santé périphériques qui font face à la plupart des défis, notamment les difficultés d’accès à certaines zones où se trouvent certains districts sanitaires.



Liste des abréviations


ASBC : Agent de santé à base communautaire

BF : Burkina Faso

CISSE : Centres d’Information Sanitaire et de Surveillance Epidémiologique

CSPS : Centre de Santé et de Promotion Sociale

CM: Centre médical

DSD : District sanitaire de Dandé

PEV : Programme Elargi de Vaccination

ICP : Infirmier Responsable de Poste

TIC : Technologies de l’information et de la communication

MSP : Ministère de la Santé et de l’Hygiène Publique

MPHH : Ministère de la santé et de l’hygiène publique

ONG : Organisation non gouvernementale

SIM : Module d’identité/identification de l’abonné («carte à puce»)

SIMR : Surveillance Intégrée de la Maladie et la Riposte

SMS : Short Message Service (service de messages courts)

TLOH : Télégramme Lettre officielle Hebdomadaire



Déclarations


Approbation éthique et consentement

L’approbation éthique de cette étude a été accordée par le Comité d’éthique de l’Institut de Recherche en Science de la Santé (N°2019-012/MESRSI/SG/CNRST/IRSS/CEIRES) de BF. Nous avons également obtenu l’autorisation de collecte de données du ministère de la santé. Conformément aux directives éthiques, les objectifs de l’étude ont été clairement expliqués aux participants qui ont donné leur consentement verbal avant d’être interviewés. Les personnes qui n’ont pas accepté de participer ont été exclues de l’étude. Le consentement obtenu de tous les participants était oral et éclairé.


Contributions des auteurs

Tous les auteurs ont participé activement à la réalisation de cette étude. HS a contribué à la conception de l’étude, à la collecte et à l’analyse des données, et a rédigé le manuscrit initial. GK et DWM ont coordonné l’étude et contribué à la collecte et à l’analyse des données. HSa a contribué à la conception de l’étude, à la supervision de l’étude et à la rédaction du manuscrit.


Financement

Cette étude a été financée par le ministère danois des affaires étrangères (subvention Danida n° 17-07-KU).


Remerciements


La présente étude fait partie d’un projet de recherche financé par le Ministère danois des Affaires étrangères sous le titre «Emerging epidemics : Improving Preparedness in Burkina Faso» (Danida Fellowship project number : 17-07-KU). Nous tenons à remercier l’Université de Copenhague, le Groupe de recherche sur les initiatives locales (GRIL) de l’Université Joseph Ki-Zerbo et l’Institut de recherche en science de la santé (IRSS) pour leur collaboration au programme. Nous tenons également à souligner le travail effectué par les chercheurs et le personnel de soutien du GRIL. Une mention spéciale va à tous les membres de l’équipe de recherche «Epidémies émergentes». Enfin, les auteurs remercient les personnes interrogées qui ont donné de leur temps pour participer aux entrevues.


Déclaration de divulgation


Aucun conflit d’intérêt potentiel n’a été signalé par les auteurs.


Notes

[1] L’Office national des télécommunications (ONATEL), outre son monopole sur le réseau téléphonique fixe, a créé « Telmob » en 1996. En 2006, le groupe Maroc Telecom devient actionnaire de la société à 51 %, et ONATEL est devenue une société anonyme (Onatel-SA). Dans le cadre de cette démarche de privatisation du secteur des télécommunications, Maroc Telecom a porté sa participation dans la société à 61 %. En janvier 2021, la direction d’Onatel-SA a décidé de remplacer l’identité visuelle Telmob par Moov Africa.

[2] Telecel Faso appartient à la société nationale Planor Afrique, groupe de l’entrepreneur burkinabé Apollinaire Compaoré. Telecel Faso a été créée en 2000, suite à la libéralisation du marché de la téléphonie mobile.

[3] Ce réseau téléphonique a connu plusieurs changements de nom : d’une part, Celtel a été rebaptisé Zain en 2008, suite à la décision du groupe Celtel Burkina Faso SA de créer le premier réseau intercontinental sans frontières au monde. Puis, en 2010, Zain a changé de nom et de propriété pour devenir Airtel, une filiale de Bharti Airtel. Enfin, Airtel est devenue Orange en 2016, suite au rachat des parts d’Airtel Burkina par le groupe de télécommunications français Orange.

[4] Traduction des auteurs.

[5] Le bricolage avait désigné le style de travail prémoderne des « autres-ailleurs » (Domínguez-Guzmán et al., 2022, p. 3). Trois caractéristiques déterminantes du bricolage sont identifiées : premièrement, les processus institutionnels, technologiques et idéationnels sont entrelacés et se renforcent mutuellement ; deuxièmement, le bricolage est coproduit par l’État et la société ; et troisièmement, il s’agit toujours d’un processus multi-échelle dans lequel de multiples acteurs interviennent continuellement à différents niveaux connectés. (Mayaux et al., 2023, p. 19).

[6] Benouniche et al. (2014, p. 7) ont décrit trois cas de bricolage : les utilisateurs locaux ont d’abord appris à faire fonctionner des équipements importés, puis ont déconstruit les systèmes d’irrigation goutte-à-goutte et ont conçu des systèmes alternatifs à faible coût, et enfin ils ont sélectionné et conçu des systèmes « normaux ».

[7] Une épidémie fait référence à l’apparition d’un nombre étendu et élevé de cas d’une maladie infectieuse particulière au sein d’une population ou d’une zone géographique spécifique. Elle se caractérise par une forte augmentation du nombre d’individus touchés par la maladie au-delà de ce qui est normalement attendu (Faye et al., 2017).

[8] Comme le révèle l’analyse, ce dispositif de communication est ancien. Nous ne connaissions pas la signification de l’acronyme.

[9] Généralement, ces formulaires comportent les rubriques suivantes : la formation sanitaire de provenance, l’identité et l’adresse du patient, son statut vaccinal (nombre de doses reçues contre la maladie contractée, date de la dernière dose du vaccin reçu, l’investigation du cas, c’est-à-dire de ladite maladie (date de consultation, date de notification/déclaration, date de début d’éruption, date d’investigation, et l’identité de l’investigateur), l’histoire de la maladie (signe clinique, notion de voyage dans les 7 à 21 jours avant l’éruption, localité visitée, l’hospitalisation et son issue), le prélèvement (type de prélèvement, date de prélèvement, date d’envoi au laboratoire et date de réception par le laboratoire, date d’expédition à la DPV), le résultat de laboratoire (type d’examen réalisé, date d’expédition des résultats à la DPV), la classification finale (confirmé par laboratoire, confirmé par lien épidémiologique, confirmé par lien clinique) et l’identité de l’investigateur (nom, prénom, titre, adresse et téléphone). 

[10] Il faut souligner que lorsque nous avons demandé à rejoindre ce groupe, le responsable du CISSE a refusé catégoriquement, car il s’agissait de données épidémiologiques partagées. Comme je ne suis pas un agent du district, je n’avais pas le droit d’y participer.

[11] Concept utilisé pour qualifier celui qui fait du bricolage (Mayaux et al., 2022 ; Benouniche et al., 2014).

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